A la une La Garonne en crue à Toulouse lundi 10 janvier 2022.

Infoclimat / Observator

Impressionnantes crues dans le Sud-Ouest

11/01/2022

Suite à un front chaud aquitain particulièrement chargé en eau, issu d’une rivière atmosphérique, les cumuls de pluie ont atteint 100 à 200 mm en deux jours, des Pyrénées-Atlantiques à l’Ariège, générant d’importantes crues, parfois les plus importantes depuis plusieurs décennies.

Un front chaud aquitain

Pendant près de 48 heures, dimanche et lundi, des pluies soutenues ont concerné les départements pyrénéens, avec un effet orographique dû à un courant de nord-ouest. On parle de front chaud aquitain.

Qu’est-ce qu’un front chaud aquitain ?

Il s’agit d’un front chaud abordant la France par la façade atlantique, dans un flux orienté au nord-ouest rapide en altitude, à l’avant d’une dorsale bien alimentée en air chaud tropical maritime, et dont la progression est ralentie ou stoppée par de l’air froid continental antérieur. Cette progression lente vers l’est, conjuguée au flux de nord-ouest, génère d’importants cumuls de pluie et/ou neige sur les plaines du Sud-Ouest et sur les Pyrénées. Cette configuration peut conduire à des problèmes de crues et inondations, parfois aggravées par la fonte des neiges et/ou à des problématiques d’avalanches.

C’est typiquement ce qui s’est produit. Ici, l’air chaud tropical maritime était fourni par une branche de rivière atmosphérique (figure ci-dessous). Le radiosondage de Bordeaux de la nuit du 9 au 10 janvier a mesuré un isotherme zéro à 2 500 m, et une valeur d’eau précipitable de 29 mm, correspondant au haut de la distribution pour l’époque de l’année. L’eau précipitable est un potentiel, et il a été largement exploité dans les Pyrénées.

Autrement dit, la hausse de la limite pluie-neige, parfois bien au-dessus de 2 000 m, qui a contribué à une fonte nivale, les précipitations régulières et abondantes par blocage sur le relief et la masse d’air particulièrement chargée en eau ont contribué au caractère remarquable de cet évènement. 

Il est significatif que celui-ci intervienne un mois tout juste après le 9 décembre dernier, marqué par de très importants cumuls de pluie et de neige dans les Pyrénées. Par exemple, Laruns, dans les Pyrénées-Atlantiques, avait battu le 9 décembre dernier son record absolu de précipitation quotidienne avec 186,9 mm la journée du 9 décembre. Le 9 janvier, 100,5 mm sont tombés dans la journée climatologique (de 7 h du matin à 7 h le lendemain), soit la deuxième journée la plus pluvieuse en janvier depuis le début des mesures en 1964. Deux évènements exceptionnels du même type rapprochés.

Des niveaux de crue plus vus depuis longtemps.

La crue du Salat dans le secteur de Saint-Girons, en Ariège, a dépassé hier soir celle de référence de 1992, avec une hauteur de 3,14 m. C'est la plus forte crue à la station depuis mai 1977. 

La crue de la Garonne à Toulouse a atteint un plateau ce matin avec une hauteur maximale de 4,31 m, très proche de la crue de juin 2000 (4,38 m). À Portet sur Garonne, le débit maximal a été estimé à  3436 m³/s, soit une durée de retour supérieure à 20 ans et la quatrième plus forte crue depuis 1910, derrière février 1952, mars 1930 et donc juin 2000. Note : une durée de retour de N ans signifie que chaque année, la crue a statistiquement 1 chance sur N de se produire.

On est resté heureusement très loin de la plus forte crue connue à ce jour,  juin 1875 avec 8,32 m, dont la durée de retour dépasse l’entendement humain. Cette crue historique avait dévasté le quartier Saint-Cyprien de Toulouse : plus de 200 morts et 1 000 maisons détruites. 

À Tarbes cette fois, avec une côte de 2,18 m atteinte hier soir, c’est la crue la plus importante depuis le début des mesures en 1981. C’est la seconde fois en l’espace d’un mois que la côte des 2 m y est dépassée. Encore une fois, le rapprochement de deux évènements de ce type est exceptionnel. 

Enneigement variable selon l’altitude et les massifs dans les Pyrénées. Il est globalement excellent, en dépit de la fonte et du tassement à certaines altitudes, continuant de flirter par endroits avec les records pour la période, comme le montrent les relevés de la station nivose du port d’Aula en Ariège.