Infos climat Grand soleil sur le littoral varois fin janvier.

Infoclimat / Sylvain Lesueur

Pluies et neige de retour sur le Sud-Est après plus de 40 jours sans pluie

15/02/2022

Le début d’année 2022 est très sec. Avant le retour de la pluie et de la neige en ce début de semaine, certaines régions du Sud-Est n’avaient pas eu un seul jour de pluie durant plus d'un mois ! Que constate-t-on ? Est-ce exceptionnel ? Quelles peuvent être les conséquences de cette sécheresse hivernale ?

On définit la durée d'une période de sécheresse météorologique par le nombre de jours consécutifs où le cumul de précipitations est inférieur à 1 mm (en effet la rosée par exemple peut se déposer dans le pluviomètre sans apporter de pluie). Avec cette définition, certaines stations du Sud-Est ont atteint une durée de sécheresse de plus de 40 jours, les dernières précipitations ayant eu lieu le 27 décembre.

Les différents types de sécheresse

Il convient de distinguer la sécheresse météorologique, de la sécheresse agricole et de la sécheresse hydrologique.
• La sécheresse météorologique correspond au déficit de précipitations et peut être calculée sur un mois, sur une saison ou sur une période plus longue.
• La sécheresse des sols, dite " agricole ", se caractérise par un déficit en eau des sols superficiels (entre 1 et 2 m de profondeur), suffisant pour altérer le bon développement de la végétation. Elle dépend des précipitations et de l'évapotranspiration des plantes. Cette notion tient compte de l'évaporation des sols et de la transpiration des plantes (l'eau puisée par les racines est évaporée au niveau des feuilles). La sécheresse agricole est donc sensible aux précipitations, à l'humidité et à la température de l'air, au vent mais aussi à la nature des plantes et des sols.
• La sécheresse hydrologique se manifeste enfin lorsque les lacs, rivières ou nappes souterraines montrent des niveaux anormalement bas. Elle dépend des précipitations mais aussi de l'état du sol influant sur le ruissellement et l'infiltration. Le réseau hydrographique et les caractéristiques des nappes déterminent les temps de réponse aux déficits de précipitations observés sur différentes périodes.

Pluies et neige de retour dans le Sud-Est

Dimanche 13 février, à l’avant d’une perturbation affectant la France, les pluies ont d'abord concerné les Cévennes, avec 78 millimètres recueillis en 24 heures.
Il a fallu attendre la progression de la perturbation vers la région PACA pour observer un épisode pluvieux assez étendu lundi 14 février.

  • Pluies : les cumuls quotidiens les plus forts sont observés près du littoral du Var et de la Côte d’Azur, avec 58 mm mesurés à Méounes-les-Montrieux (83), 51 mm à Mandelieu-La-Napoule (04), 36 mm à Marseille (13). Il a souvent plu plus de 30 millimètres dans ces régions, ce qui correspond à la normale d'un mois de pluies. A contrario autour du Golfe du Lion, la journée est restée peu arrosée, les pluviomètres sont restés secs du côté de Sète ou de Béziers dans l’Hérault. 
  • La neige, elle, est tombée en abondance dans les Alpes-du-Sud. Les dernières chutes de neige significatives dataient de plus d’un mois. A Millefonts, dans le Mercantour à 2430 m d’altitude, l'épaisseur de neige est passée  de 35 cm à 70 cm ; à Restefond, dans l’Ubaye, à 2550 m d’altitude, de 40 à 65 cm  soit 25 cm de neige fraîche.
    Et à Orcières, dans le Champsaur, à 2294 m d’altitude, de 50 à 75 cm soit 25 cm de neige fraîche. Pour cette station de mesure, il n’avait pas été observé de valeur aussi basse depuis l’ouverture de la station en 2007. Le précédent record datait de 2012 avec 88 cm pour l’épaisseur totale de la neige.
    Suite à ces chutes de neige, un avis pour risque marqué d’avalanches a été émis pour les massifs des Alpes-du-Sud.
    Tenez-vous informés en consultant nos pages Météo Montagne

Un temps perturbé circulera sur une bonne partie de la France cette semaine, mais les précipitations associées ne devraient pas toucher cette région du sud des Alpes.

Sud-Est : un déficit de pluie marqué depuis le début de l'hiver

Les pluies qui ont touché le sud-est de la France hier lundi n'effacent pas un déficit chronique sur ces régions, parfois important dans le Languedoc et sur l'est de la Corse.
Du 1er décembre au 14 février, on a ainsi mesuré :
- 21 millimètres à  Solenzara (Corse) (soit un déficit de 90 %)
- 25 mm de pluie à Sète (déficit de 80 %)
- 32 mm à Montpellier (déficit de 80 %)
- 57 mm à Bastia (déficit de 70 %)

Pas de pluie pendant plus d'un mois

C’est dans le Sud-Est que la situation est la plus critique. De nombreuses stations autour de la Méditerranée n’avaient pas connu de précipitation quotidienne d’au moins 1 mm depuis le début de l’année. On peut citer Marignane, Salon-de-Provence, Nîmes (Courbessac), Montpellier (aéroport), Aigues-Mortes, Sète, Hyères, l’île du Levant ou Toulon (liste non exhaustive).

On a cherché combien de fois ces stations avaient connu une aussi longue période de sécheresse météorologique hivernale (par hivernal on considère l’hiver météorologique et donc les mois de décembre, janvier et février) et quelle a été la durée maximale de ces périodes. Les résultats sont les suivants :

    • Marignane : 7 occurrences. Durée maximale : 54 jours en 1982-1983 ;
    • Nîmes-Courbessac : 7 occurrences. Durée maximale : 49 jours en 1982-1983 ;
    • Aigues-Mortes : 6 occurrences. Durée maximale : 58 jours en 2011-2012 ;
    • Montpellier : 5 occurrences. Durée maximale : 56 jours en 1982-1983 ;
    • Toulon : 4 occurrences. Durée maximale : 40 jours en 2005.

On se rend donc compte que les durées de sécheresse météorologique en cours ne sont pas exceptionnelles. Elles ont en général une durée de retour de l’ordre de 10 ans. À Toulon, le record est en passe d’être battu. Ce sont cependant des séries remarquables tout comme les précipitations mensuelles de janvier 2022 sur PACA où seules les années 1993, 1983, 2000 sont plus sèches (mesures depuis 1958). Si la période actuelle de sécheresse météorologique sur le Sud-Est durait encore les prochaines semaines, on arriverait alors à une situation exceptionnelle.

Plus de détails sur la situation hydrologique au 1er février en France métropolitaine.

Comment expliquer cette situation ?

La France est, en ce début d’année, sous l’influence d’un anticyclone : les fortes pressions centrées sur le pays forment un bouclier qui a tendance à repousser les perturbations océaniques vers le nord et l'est du continent.

Ces pressions élevées se sont traduites par une anomalie globale des précipitations à l'échelle du pays (déficit voisin de 40 %). Dans la partie sud, la situation était assez contrastée puisque les vents de nord-ouest dominants ont parfois bloqué les nuages et les précipitations au pied des Pyrénées (qui connaissent des cumuls excédentaires) alors que ces vents de nord-ouest s'asséchant, par effet de foehn, au passage des massifs bordant la Méditerranée (Massif central, Alpes) se traduisent par des séquences de temps ensoleillé et sec souvent accompagnées de mistral et tramontane (les stations d’Istres et Avignon ont dépassé à 4 reprises le seuil des 100 km/h en janvier).

Quelles peuvent être les conséquences de cette sécheresse hivernale ?

La situation de ce début d’année ne nous permet pas d’en tirer des conséquences pour ce printemps ou cet été. Lors de la sécheresse météorologique de janvier 1982-1983, il n'avait pas été observé de sécheresse des sols l'été suivant.

Il reste encore 2 mois pour la saison dite de recharge (septembre à mars). Pour l'instant, nous observons un déficit de 40 % de pluie par rapport à la normale. La configuration météorologique peut être plus favorable par la suite.

Pour plus d’informations sur l’état des nappes d’eau souterraine.

Est-ce la marque du changement climatique ?

Dans un contexte de changement climatique, les précipitations hivernales sont plus rares dans le Sud. On observe globalement une tendance à la diminution des précipitations hivernales sur la moitié sud du pays mais on ne voit pas de tendance à plus fine échelle sur précipitations sur le sud-est du pays l'hiver, d’après le rapport DRIAS 2020.