El Niño est de retour : quelles conséquences à l’échelle mondiale et en Europe ?
15/10/2023Après trois hivers consécutifs marqués par La Niña, le phénomène El Niño est de retour. Mais que signifie ce phénomène et quels peuvent être ses impacts sur le climat ?
En bref
El Niño est une variation naturelle du climat. El Niño impacte le climat de nombreuses régions du monde. Il induit un réchauffement planétaire et une augmentation de certains événements extrêmes. El Niño s’est mis en place au printemps et a cru pendant l’été. Il devrait encore progresser cet automne, pour atteindre sa pleine puissance autour du mois de décembre.
El Niño : qu’est-ce que c’est ?
El Niño est un phénomène qui concerne la zone équatoriale de l’océan Pacifique. Il se produit avec une périodicité de deux à sept ans environ. Le dernier épisode important enregistré remonte à 2015-2016.
Pour décrire El Niño, il faut partir de la situation considérée comme normale dans le Pacifique : les alizés, vents des régions intertropicales, soufflent d’est en ouest et poussent l’eau chaude de surface vers l’ouest de l’océan Pacifique dans sa zone équatoriale. Au large du Pérou, une remontée d’eaux froides depuis les profondeurs, plus riches en nutriments, se produit alors et entraîne une baisse de la température de l’eau près de la surface.
A l’ouest, des eaux de surface se font plus chaudes vers l’Indonésie, la Papouasie et le nord de l’Australie. L’évaporation de la mer y devient plus importante et les précipitations plus abondantes.
Lorsque l’événement El Niño survient, la situation s’inverse. En basse altitude, les vents d’est faiblissent, voire s’inversent, l’océan devient plus chaud aux abords des côtes du Pérou.
Les eaux chaudes de surface, habituellement à l’ouest, gagnent le centre du Pacifique et les zones de plus fortes précipitations se décalent également.
D'où vient le nom d'El Niño ? Les pêcheurs péruviens ont été les premiers à remarquer ce phénomène de réchauffement des eaux qui rendait la pêche moins fructueuse. Ce réchauffement s'observait souvent à partir du mois de décembre et a ainsi été surnommé El Niño, «le petit garçon», en référence à "El Niño de Navidad", l’enfant Jésus en espagnol, célébré à Noël.
Quelle est la situation aujourd’hui ?
L'épisode El Niño qui a débuté cet été atteint déjà une intensité modérée : l'anomalie de température de surface de la mer est déjà de l'ordre de 1.5 degrés sur le centre du Pacifique Équatorial (indice calculé par l’anomalie moyenne sur la région définie entre 5° N et 5°S, et 170°W et 120°W, appelée “Niño3.4”).
Ce phénomène est prévu de se renforcer au cours des prochains mois pour atteindre son maximum entre fin 2023 et début 2024. Selon l’intensité de ce maximum, il pourrait appartenir à la catégorie des événements forts comme lors des hivers 1997/1998 ou 2015/2016.
El Niño : quelle influence sur le climat mondial ?
Le phénomène El Niño touche l’océan Pacifique, la plus grande étendue d’eau de la planète, et affecte le climat mondial dans son ensemble. Ses conséquences sont variées. Ainsi, par exemple, dans l’océan Pacifique, on a pu attribuer à El Niño une modification du régime des cyclones. Des hivers plus doux ont été constatés à l’ouest du Canada, mais ils ont été aussi parfois plus froids au Mexique. Et tandis que des pluies abondantes touchent les côtes péruviennes, des conditions très sèches concernent l’Amazonie. La sécheresse peut affecter l’Indonésie et l’Australie, pouvant occasionner des feux de forêts importants.
En fonction de l’intensité du phénomène, ses anomalies au niveau atmosphérique se propagent au nord et au sud du Pacifique, au-delà donc de la zone équatoriale. À l’échelle mondiale, El Niño peut conduire à une légère augmentation de la température de la planète si l’événement est marqué.
El Niño : y a-t-il une influence sur le climat en Europe ?
Les effets statistiques d’un événement El Niño sur le climat européen diffèrent entre le début de l’hiver et la fin de l’hiver. Généralement, lors d’un épisode El Niño marqué, on observe plus souvent, en début d’hiver, des conditions dépressionnaires sur le proche Atlantique. Cela se traduit sur l’Europe de l’Ouest par des températures plus douces et des conditions plus humides que la normale.
D'autres facteurs qu’El Niño influencent également le climat à l'échelle mondiale, comme l'état de l'Océan Indien, plus chaud que la normale à l'ouest et plus froid à l'est, ou encore les fortes anomalies de température de l'Atlantique nord.
L’interaction entre l’océan et l’atmosphère participe à déterminer le temps à venir dans les trois prochains mois. Des modèles représentant ces interactions sont utilisés pour l’élaboration des tendances climatiques à trois mois. Actuellement, les tendances les plus probables sur l’Europe sont cohérentes avec les conditions observées lors de phénomènes El Niño modérés en fin d’automne et début d’hiver.
Y a-t-il un lien avec le changement climatique ?
El Niño comme La Niña sont des oscillations naturelles du climat qui s’inscrivent dans un contexte de réchauffement climatique global d’origine humaine.
Ces huit dernières années ont été les plus chaudes à l’échelle du monde. Elles étaient pourtant sous l’influence climatique de La Niña, qui a tendance, à l’inverse d’El Niño, à modérer les températures moyennes à l’échelle mondiale.
Si El Nino augmente la probabilité de battre des records de température moyenne à l’échelle planétaire, c’est principalement le réchauffement climatique d’origine anthropique qui cause cette tendance. De plus, l’anomalie chaude est encore en cours de mise en place et la signature « El Niño» pour l'année 2023 dépendra de l'amplitude du phénomène.