A la une Image d'illustration du naufrage du Titanic.

GettyImages

14-15 avril 1912, le naufrage du Titanic : la météo a-t-elle joué un rôle ?

15/04/2022

C’est probablement l'un des naufrages les plus meurtriers et les plus marquants de l’histoire de la navigation maritime. Dans la nuit du 14 au 15 avril 1912, l’« insubmersible » Titanic heurtait un iceberg au large du Grand Banc de Terre-Neuve avant de sombrer en quelques heures, emportant avec lui 1 500 de ses 2 200 passagers. Des défaillances humaines, trop peu de canots de sauvetage et des problèmes de cloisonnement du paquebot l’ont certainement mené à sa perte. Mais, malgré le temps calme et l’absence de brouillard cette nuit-là, la météo a joué aussi un rôle, en favorisant notamment la présence d’icebergs à cette latitude et la formation d’un phénomène optique de mirage, faussant la perception de l’horizon.

Retour sur une nuit tragique

Au printemps 1912, Le paquebot géant le Titanic entame son voyage inaugural qui doit le mener de Southampton à New York. Il quitte l'Angleterre le 10 avril, fait escale en France et en Irlande avant de mettre le cap à l'ouest. Dans la nuit du 14 au 15 avril, parvenu au large du Grand Banc de Terre-Neuve, le veilleur Frederick Fleet voit un iceberg haut de 30 m à moins de 500 m de distance. Il est trop tard, impossible d'éviter un choc latéral qui déchire la coque à tribord. Il est 23 h 40. La voie d'eau sera fatale à tout le bâtiment mal cloisonné. Le Titanic disparaît à 2 h 20.
Le Grand Banc est un ensemble de plateaux sous-marins situé au sud-est de Terre-Neuve, au bord du plateau continental nord-américain. Le courant froid du Labrador s'y mélange avec les eaux chaudes du Gulf Stream. La zone est donc propice aux brouillards, aux formations nuageuses et aux tempêtes. Mais en cette nuit du 14 au 15 avril les conditions météo sont bien différentes. Un vaste anticyclone est centré justement sur Terre-Neuve. La météo est calme, pas de brume, pas de vent, pas de vagues. Ne serait-ce pas ces conditions, normalement parfaites pour naviguer, qui auraient trompé la timonerie ?

Des icebergs plus au sud à cause d’un hiver doux

Les icebergs de l'Arctique sont issus du morcellement des glaciers continentaux du Groenland et de la Terre de Baffin. Dès le mois de mars où les températures s'adoucissent, ils se répandent dans les environs du Banc de Terre-Neuve sous l'impulsion du courant du Labrador. Ils croisent ensuite les eaux plus chaudes du Gulf Stream orientées nord-est et suivent cette direction en se désagrégeant. Ils sont composés d'eau douce et adoptent des formes et des teintes très diverses qui peuvent parfois tromper l’œil humain. Un hiver doux repousse vers le sud la limite des glaces de printemps et augmente le risque de collision. En avril 1912 le printemps était bien amorcé et il suivait justement un hiver particulièrement doux. La zone du Grand Banc était donc parsemée d’icebergs. Le Carpathia, un autre navire, en a dénombré 25 dépassant 60 m de haut et plusieurs douzaines d’autres dans la zone en arrivant au secours du Titanic.

Un phénomène de mirage créant un faux horizon

Une autre question se pose. Comment l'équipage a-t-il pu être surpris par un iceberg haut de 30 m alors qu'en passerelle la vue porte à 15 km et qu'il n'y a pas de brouillard ?
La perception de l'horizon peut être faussée par des mirages supérieurs (aussi appelés mirages froids) fréquents à ces latitudes. L'atmosphère est structurée en couches plus froides au sol (banquise, icebergs, courant du Labrador) qu'en altitude. La lumière issue d'un objet en surface s'incurve et rebondit sur la couche d'air chaud située en hauteur. Il semble provenir du ciel. On parle de mirage supérieur. Si les différences de température entre les différentes couches sont plus importantes, comme ça pouvait être le cas la nuit du naufrage, les images des objets ainsi produites peuvent être plus plates avec de fortes variations de contraste. L'océan lointain a pour image une bande de mirage d'aspect brumeux qui masque l'horizon et les obstacles en approche. Cela peut laisser croire que l’horizon est plus haut qu’il n’est en réalité, surtout la nuit où la bande de mirage sera plus sombre et moins différentiable de l’océan.