Entretiens Cosparin permet ainsi d’anticiper les risques et de protéger les populations dans les zones qui ne disposent pas d’observations radar.

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Monde : prévenir le risque inondation depuis l’espace

19/03/2021

Le projet Cosparin de l’ESA porté par Predict Services, filiale de Météo-France, permet de proposer des services d’aide à la gestion du risque inondation sur l’ensemble du globe.

Associé au projet Cosparin, Météo-France a développé un produit basé sur l’intelligence artificielle pour identifier les pluies intenses sur l’ensemble du globe grâce aux observations par satellite. Le Cerema complète le consortium avec ses modèles de terrain. Cosparin permet ainsi d’anticiper les risques et de protéger les populations dans les zones qui ne disposent pas d’observations radar.

Sylvain Le Moal est responsable de division au Centre de météorologie spatiale de Lannion.
 

Quel est l’objectif du projet Cosparin ?

" C’est un projet qui vise à identifier le risque inondation partout sur le globe, depuis l’espace.
Pour estimer les pluies, l’instrument de référence est le radar. Mais cet équipement reste l’apanage des pays industrialisés. Seules 30 % des surfaces continentales dans le monde bénéficie d’une couverture radar. L’idée du projet Cosparin, porté par Predict Services sous l’égide de l’ESA, dont Météo-France est partie prenante, est de caractériser le risque inondation en temps réel et de le prévenir en utilisant les satellites qui, eux, couvrent l’ensemble de la planète, pour pallier le manque de données radar. Estimer  la pluie depuis l’espace autrement dit !
C’est loin d’être une évidence : les précipitations ont lieu dans les basses couches de l’atmosphère et les conséquences de ces pluies dépendent beaucoup de la topographie et de la nature des sols. Pour identifier un risque inondation, il faut disposer à la fois d’un modèle de terrain et d’une estimation de l’intensité des pluies. Depuis l’espace, les satellites météorologiques que nous utilisons ne permettent pas d’observer directement les précipitations. "

Seules 30 % des surfaces continentales dans le monde bénéficie d’une couverture radar.

Et pourtant ça fonctionne… Comment parvient-on à identifier les pluies depuis l’espace ?

" Oui, les premiers résultats sont très encourageants ! Nous fournissons une carte de précipitations, des lames d’eau pour l’ensemble du globe, pertinente, et toutes les 30 minutes. Elle permet aux décideurs d’anticiper les risques et de protéger les populations dans les zones qui ne disposent pas d’observations radar.
La température de sommet des nuages est une donnée capitale que nous pouvons exploiter à la fois sur les satellites géostationnaires et polaires grâce à leurs canaux dans l’infrarouge. Au début du projet, nous avons testé deux solutions : une méthode déterministe qui consistait à déduire de cette information et de données complémentaires (canaux vapeur d’eau, angle zénithal solaire…) les pluies et leurs intensités, et une méthode neuronale basée sur l’intelligence artificielle qui a immédiatement montré des résultats encourageants. Nous avons opté pour cette seconde solution. Concrètement, nous avons développé un réseau de neurones qui, lors de l’apprentissage, sur une période de plusieurs années, met en relation les informations satellitaires avec les données fournies par les radars dans les zones couvertes. Le modèle ainsi créé permet d’estimer opérationnellement et en temps réel les pluies sur le monde entier, même dans les zones où les radars sont absents. Cette méthode très innovante a été entièrement développée par les équipes de Météo-France. "

Le modèle ainsi créé permet d’estimer opérationnellement et en temps réel les pluies sur le monde entier, même dans les zones où les radars sont absents.

C’est donc une vraie prouesse scientifique ?

" Oui, tout à fait, estimer la pluie depuis l’espace n’a rien d’une évidence. Cosparin est un projet jeune : il a démarré en 2019. La première version est opérationnelle et distribuée vers Predict Services dans le cadre du projet et aussi vers les serveurs Synopsis (de développement) depuis janvier 2020. La deuxième version est en phase d’évaluation et une troisième version est actuellement en développement. Nous sommes partis de presque rien, mise à part cette volonté avec nos collègues de Predict Services, filiale de Météo-France, de prendre part au projet de l’ESA et d’utiliser les données satellites pour mieux prévenir le risque inondation dans tous les pays du monde. Une phase pilote vient de démarrer pour une durée de deux ans sur la zone de l’océan Indien comprenant La Réunion, Madagascar, Maurice, les Seychelles à laquelle est associée la DIROI. Grâce à l’avancée technologique permise par l’intelligence artificielle, Météo-France, avec l’expertise de ses équipes du Centre de météorologie spatiale puis avec l’aide de son laboratoire d’intelligence artificielle, le LabIA, a développé une solution innovante et prometteuse. "