Inondations en Espagne : Valence touchée par des pluies dévastatrices
30/10/2024La région de Valence en Espagne a été touchée mardi 29 octobre par un épisode méditerranéen, associé à une goutte froide. Il a engendré de très fortes pluies et des inondations, causant un très lourd bilan humain.
Quels sont les cumuls de pluie observés ?
Mardi 29 octobre, les cumuls de pluie ont atteint des valeurs remarquables dans la région de Valence. Les pluies se sont montrées particulièrement intenses en fin de journée. On a relevé :
- au moins 618 mm à Turis, et probablement environ 700 mm en raison de données manquantes selon l'AEMET, dont 179 mm en 1 h et 42 mm en 10 minutes ! Pour mettre en perspective, ces 179 mm tombés en une heure sont un nouveau record en une heure en Espagne. Ils battent les 159 l/m² en une heure de Vinaròs le 19 octobre 2018. De plus, le cumul annuel moyen à Turis est de 475 mm. Le 29 octobre dernier, 3 heures et 20 minutes auront suffi à atteindre, puis dépasser, ce cumul annuel moyen, ce qui vient souligner l'extrême de la situation, et du climat méditerranéen. Enfin, comme la sécheresse était bien installée dans la région, il était tombé 446 l/m² seulement entre janvier 2023 et septembre 2024 soit en 21 mois entiers. Ainsi en 3h il est tombé autant que les 21 derniers mois.
- 491 mm à Chiva, dont 343 mm en 4 heures entre 16 h 30 et 20 h 30, 160 mm en 1 heure.
- 412 mm à Pedralba.
- 306 mm à El Rebollar.
- 259 mm à Alzira.
- 256 mm à Castelló.
- 234 mm à Carlet.
À quoi sont dus ces forts cumuls de pluie dans la région de Valence ?
Ces forts cumuls de pluie s'expliquent par la récurrence d’orages extrêmement intenses, bien alimentés en humidité de Méditerranée, prenant un caractère stationnaire dans la région de Valence. Ces importantes précipitations sont liées à une goutte froide (dépression d’altitude associée à de l’air froid) qui est venue glisser sur le proche Atlantique pour se centrer mardi 29 octobre sur le nord du Maroc.
Avec la présence d’air froid en altitude débordant sur l’Espagne, et des basses couches de l’atmosphère chaudes et humides, l’atmosphère est devenue instable, favorisant les développements orageux. Le flux d’est dans les basses couches a permis sur la région une bonne alimentation en humidité de Méditerranée, où les températures de surface sont encore voisines de 20 degrés à proximité de Valence.
Dans son mouvement, la dépression d’altitude est venue forcer l’air chaud et humide des basses couches à s’élever, générant des nuages d’orages de grande extension verticale. Le relief dans l’arrière-pays de Valence y a également contribué.
Enfin, le système orageux qui a dévasté la région a pris un caractère stationnaire. Des orages se sont régénérés continuellement au même endroit pendant plusieurs heures. On parle d’orage en "V" en raison de la forme qu'il prend sur les images satellites. La pointe du “V” est située à l’endroit où les orages se régénèrent.
Ces pluies touchent-elles l’Hexagone ?
Cette goutte froide venue du proche Atlantique a été responsable de l’épisode méditerranéen du 26 et 27 octobre dans le Sud-Est, avec des cumuls particulièrement importants dans le Var. Elle a ensuite engendré d’importants cumuls de pluie sur les Pyrénées-Orientales dans un flux s’orientant à l’est.
Dans le Roussillon, on a relevé 132 mm en 24 heures à Perpignan, 113 mm à l’Ille-sur-Têt. Ces précipitations ont permis l’humidification des sols, mais ne sont pas encore suffisantes pour retrouver une situation proche de la normale.
En marge de cette goutte froide devenant de moins en moins dynamique, on devrait observer quelques précipitations modérées du côté des Pyrénées jusqu’à samedi.
Quel est l’impact du changement climatique sur ces fortes précipitations ?
De tels épisodes de fortes précipitations ont déjà existé par le passé. Ils sont caractéristiques d’un climat méditerranéen où les événements rapides peuvent engendrer de nombreux dégâts. Ils sont liés à une configuration atmosphérique particulière, avec la présence d’une goutte froide en altitude. La topographie joue également un rôle important avec la présence du relief à proximité d’une mer servant de carburant aux orages. En raison du relief, les bassins versants sont soumis à des crues rapides.
De telles configurations ont déjà été observées par le passé dans la région de Valence, notamment en 1982 et 1987. Il faut remonter au 11 septembre 1996 pour retrouver un épisode aussi intense. On avait mesuré 520 mm de précipitations en 24 heures.
Le changement climatique apparaît comme un facteur aggravant. L’augmentation de la température globale tend en effet à accroître la quantité d’eau précipitable présente dans l’atmosphère, car une atmosphère plus chaude peut transporter plus de vapeur d’eau.
Le changement climatique accroît la fréquence et l’intensité des épisodes de fortes précipitations, avec une plus grande certitude sur les rives nord de la Méditerranée.