Mais pourquoi fait-il aussi mauvais depuis le début de l'été en France ?
29/07/2021 Le mois de juillet a été marqué par des intempéries exceptionnelles en Allemagne, Belgique, Pays-Bas et au Royaume-Uni. Chez nous en France, le mois a été particulièrement pluvieux et s'achève avec une semaine encore maussade, après un mois de juin déjà bien arrosé.
François Gourand, ingénieur prévisionniste à Météo-France, répond à nos questions et nous donnent toutes les explications.
François, peux-tu nous expliquer pourquoi depuis le début de l'été il pleut autant ?
La succession de gouttes froides que nous avons connue depuis la mi-juin a engendré une récurrence pluvieuse particulièrement marquée sur le nord-ouest de l’Europe. En France, sur la période 1er juin-28 juillet, la pluviométrie à l’échelle de la France est la 3e valeur la plus forte depuis 1959 sur cette période, uniquement devancée par les étés 1992 et 1987, avec des précipitations supérieures de 53 % par rapport à la normale.
Qu'est-ce qu'une goutte froide, et comment l'Europe a été impactée ?
Une goutte froide est une poche d’air froid d’altitude, située dans la moyenne troposphère (autour de 3 000 à 7 000 m d’altitude) qui déstabilise l’atmosphère, favorisant le développement de nuages et pluies souvent orageuses en cette saison, et qui peut engendrer, quand elle se déplace lentement, de fortes pluies et donc des inondations.
C’est ce qui s’est produit d’abord en Allemagne et en Belgique, et dans une moindre mesure sur le nord-est de notre pays lors de la semaine du 14 juillet, puis sur le Royaume-Uni plus récemment. On peut penser que la persistance d’un blocage chaud et sec sur l’est et le nord de l’Europe a empêché les gouttes froides de circuler plus rapidement vers l’est de l’Europe, favorisant ainsi ces épisodes de pluies diluviennes.
Est-ce si inhabituel un été aussi pluvieux ?
La pluviométrie de ce mois de juillet en France est abondante, nettement supérieure à la normale, avec une valeur au 28 juillet de 83,9 mm, soit la 11e valeur la plus forte depuis 1959, loin de juillet 2014 (116,2 mm), juillet 2000 (111,5 mm)… Dans le détail, toutes les régions n’ont pas été concernées par cette forte pluviométrie, de l’Aquitaine à la Vendée, les précipitations sont inférieures à la normale, parfois nettement, tout comme sur le Roussillon, le Var et la Corse, où il n’a parfois pas du tout plu depuis le début du mois.
La pluviométrie particulièrement abondante de cet été pèse de façon déterminante sur l’impression d’été « pourri », mais les températures sont néanmoins supérieures de 1,1 °C par rapport aux normales de 1981-2010 à l’échelle du pays, et l’ensoleillement est très proche de la normale sur la plupart des régions, ce qui est toutefois moins vrai sur la pointe bretonne, le piémont pyrénéen et le Centre-Est, où on mesure un déficit de 10 à 20 % d’ensoleillement depuis le 1er juin.
Ce bilan, pas si déséquilibré, traduit l’alternance de séquences chaudes et ensoleillées (jusqu’à la mi-juin, après la mi-juillet) avec la période de la mi juin à la mi-juillet qui a été beaucoup plus maussade, nuageuse et pluvieuse, avec une fraîcheur parfois marquée. Jusqu’ici, l’été est pluvieux, au contraire des 6 derniers étés qui avaient été plus secs que la normale, parfois nettement.
Est-ce lié au changement climatique ?
On ne peut pas relier cette succession de gouttes froides au changement climatique. Les gouttes froides sont liées à la circulation atmosphérique, et on n’a aujourd’hui pas de certitude sur la façon dont le changement climatique affecte la circulation des moyennes latitudes. En revanche, dans une atmosphère plus chaude, l’atmosphère peut contenir davantage de vapeur d’eau, ce qui fait qu’un même phénomène pluvieux peut devenir encore plus pluvieux. C’est ce qu’on appelle «l'intensification des pluies intenses ». Ainsi, les pluies associées aux gouttes froides prises individuellement peuvent être plus abondantes.
Quel temps se profile ces prochains jours ? Peut-on espérer l'arrivée de l'été... au mois d'août ?
Pour les prochains jours, on va rester sous influence du flux océanique assez perturbé, avec un temps changeant sur la plupart des régions, avec des passages pluvieux, qui ne devraient cependant pas apporter de quantités trop importantes, car les perturbations circuleront régulièrement. Les régions méditerranéennes devraient rester souvent au soleil avec des précipitations plus faibles, mais conserveront une chaleur proche des normales de saison. Ailleurs, les températures resteront fraîches pour la saison, souvent 2 à 4 °C sous les normales de saison, particulièrement dimanche avec 4 à 7 °C sous les normales.
Plus loin au mois d’août, les premières tendances n’indiquent pas de risque de canicule jusqu’au 10 août au moins, avec un flux toujours de dominante océanique relativement frais et humide. Pour la suite du mois, les tendances sont beaucoup moins fiables et on ne peut pas prévoir ce qu’il en sera de la fin du mois.