Changement climatique Illustration villes et changement climatique

Météo-France / Eddy Duluc

Les villes face au changement climatique

29/10/2020

Le milieu urbain est particulièrement sensible aux impacts du changement climatique, notamment à l’augmentation des températures et de la fréquence et de l’intensité des vagues de chaleur. Météo-France participe à de nombreux projets destinés à mieux comprendre les microclimats urbains, à les modéliser et à aider les acteurs de la ville à prendre les meilleures décisions afin d’atténuer les effets de l’évolution du climat et de s’y adapter.

Les villes et ses habitants sont en première ligne face aux conséquences du changement climatique. L’espace urbain représente en effet près de 22 % du territoire français et regroupe surtout plus des trois quarts des citoyens (77,9 % des Français vivaient en milieu urbain en 2010 selon l’INSEE). 

Les projections climatiques qui anticipent une augmentation de la température en France métropolitaine et une augmentation de la fréquence et de l'intensité des événements extrêmes (pluies intenses, vagues de chaleur…), laissent présager des impacts très importants en milieu urbain.

Adapter la ville

Dans ce contexte, il est capital de déterminer de quelle manière la ville peut s’adapter. Il faut aussi mesurer avec précision les effets du changement climatique en fonction de la structure des villes et examiner les solutions envisagées pour atténuer les effets d’un climat en évolution.

Pour parvenir à apporter ces solutions, l’approche est forcément interdisciplinaire. Les expertises conjointes et croisées sont issues des travaux de climatologues bien sûr, mais aussi d’urbanistes, d’architectes, d’hydrologues, d’ingénieurs du bâtiment, d’économistes, de sociologues… 

Mais pour modifier structurellement une ville, il faut du temps. Car les villes, notamment en Europe, sont le fruit de longs processus entamés il y a plusieurs siècles. Les bâtiments eux-mêmes ont une durée de vie de 50 à plus de 100 ans. Il va donc de soi que pour mieux adapter la ville au climat futur, tout commence par la modification des normes de construction et des habitudes de planification urbaine.

Pour parvenir à ce résultat, Météo-France a mené et continue de mener de nombreux projets en compagnie d’organismes publics et d’agences d’urbanisme pour étudier différents aspects de l’interaction entre ville et changement climatique et proposer des outils ou une base de réflexion, pour des scénarios d’adaptation :

Ces recherches répondent à de nombreuses problématiques :

  • Comment faire des projections climatiques à l’échelle du territoire urbain ?
  • Comment intégrer le changement climatique dans la gestion de l’expansion continue des espaces urbains ?
  • Comment évaluer les stratégies d’adaptation urbaines ?
  • Comment mettre au point des services climatiques urbains qui peuvent aider les responsables des cités à prendre des décisions ?
  • Comment améliorer les outils de prévision météorologique pour les zones urbaines, afin de prévenir à courte échéance des dommages induits par les phénomènes météorologiques les plus intenses, et contribuer ainsi à l’adaptation et la résilience des territoires urbains et péri-urbains ?

Des projets variés avec de nombreux points communs

Météo-France mène, depuis plusieurs années, des activités de recherche grâce aux travaux du Centre national de recherche météorologique (unité mixte Météo-France - CNRS).
Les projets en cours en deux mots :

PANAME 2022 
Cet important programme de recherche a pour ambition de mieux comprendre les causes et effets du changement climatique en environnement urbain, grâce à des campagnes intensives de mesures qui se tiendront en région parisienne à l’été 2022. PANAME 2022 rassemble dix projets de recherche menés par des scientifiques des laboratoires de Météo-France, du CNRS, de l’Université Paris-Est Créteil, de Sorbonne Université, de l’Institut polytechnique de Paris, de l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, d’INRAE, de LigAir et d’Airparif. 
PANAME 2022 a pour ambition de nous donner des clés pour rendre les villes plus résilientes au climat futur. 
Certaines des mesures initiées par ces campagnes ont vocation à perdurer jusqu’à l’horizon des Jeux olympiques Paris 2024, avec l’objectif d’améliorer la prévision de la qualité de l’air ainsi que les prévisions météorologiques en territoire urbain. L’initiative PANAME rassemble les activités de mesure de terrain de plusieurs projets dans lesquels Météo-France est impliqué, notamment au travers du CNRM et du service d’avions instrumentés SAFIRE.

H2C
Le projet Heat and Health in Cities coordonné au CNRM vise à améliorer les services climatiques urbains pour aider l’action publique sur la prévention de la surchauffe en ville et de ses conséquences sanitaires. Regroupant huit partenaires, dont Santé publique France, ce projet a débuté à l’hiver 2021 pour 4 ans. Les recherches seront appliquées sur l’agglomération parisienne, et une campagne expérimentale a lieu à l’été 2022, intégrée dans le cadre de PANAME..

RDP Paris 2024
L’Organisation météorologique mondiale, organisation de l’ONU basée à Genève, a chargé Météo-France de piloter un projet de recherche international sur la problématique de l‘urbanisation et ses impacts météorologique. Regroupant des partenaires de plus de dix pays, ce projet vise à contribuer à l’amélioration des prévisions météorologiques dans les villes et les quartiers et les indicateurs pertinents pour les divers utilisateurs. Il contribuera à la définition de meilleurs services pour la période des Jeux Olympiques de Paris, et inclut un volet de mesure de terrain inscrit dans le cadre de PANAME.

ACROSS
L’objectif de ce projet est de mieux comprendre l’impact des interactions biosphère-atmosphère sur la dynamique chimique des panaches de pollution urbaine, les effets sur le bilan des photo-oxydants en général et la production d’ozone en particulier, la formation et le vieillissement des aérosols, et enfin les conséquences pour la santé et la biosphère. Le projet ACROSS inclut des observations au sol et à bord des avions instrumentés de SAFIRE pendant l’été 2022 dans le cadre de l’initiative PANAME. 
 
MOSAI (Modèles et Observations pour les Interactions entre la Surface et l’Atmosphère)
L’objectif de ce projet est d’évaluer les modèles numériques calculant les flux d’énergie et de matière à l’interface sol/atmosphère. Des stations de flux sont ajoutées autour de sites de l’infrastructure de recherche ACTRIS-FR pour étudier l’hétérogénéité des flux et des paramètres de la surface à l’échelle de la maille des modèles. Le projet MOSAI inclut un volet déployé en région parisienne dans le cadre de PANAME. 

LIFE Green Heart
Le projet EU LIFE Green Heart a pour objectif d’améliorer les conditions microclimatiques et la qualité de l’air, réduire la pollution sonore et augmenter la biodiversité au centre de Toulouse via une renaturalisation de la partie nord de l’île de Ramier et des berges de la Garonne.

PÆNDORA
Le projet PÆNDORA vise à produire une base de données libre et évolutive (pour les études environnementales et climatiques), et ce à l’échelle des quartiers pour l’ensemble des communes de France, et à concevoir des méthodologies d’accompagnement des acteurs de l’urbanisme sur les thématiques liées à l’adaptation au changement climatique.

OASIS

Météo-France participe au projet OASIS, piloté par la Ville de Paris, qui vise à transformer les cours de 10 établissements scolaires pilotes en îlots de fraîcheur accessibles aux riverains, aux côtés de la Ligue de l’enseignement Paris, du CAUE75, du LIEPP Sciences Po, du LIED-Université Paris Diderot et de l'ESIEE.

Météo-France contribue aux volets scientifiques (suivi et évaluation climatique du projet, simulations numériques sur le climat urbain) et pédagogiques (actions de formation et de sensibilisation aux enjeux climatiques).

 

D’autres projets ont déjà été menés à terme :

URCLIM (achevé en 2022)
Le but du projet était de prouver qu’il est possible de réaliser des services climatiques urbains intégrés pour les urbanistes et les acteurs associés, en utilisant des données en open source et des données climatiques régionales.
 

MApUCE (achevé en 2019)
MApUCE vise à intégrer, dans les politiques urbaines et dans des documents juridiques, des données sur le microclimat urbain, le climat et l’énergie. Cette démarche doit être applicable à toutes les villes de France grâce à la constitution de base de données urbaines et architecturale jusqu’à l’échelle des quartiers.

Ces données sont utilisées afin de modéliser (voir encadré) les villes dans le cadre de simulations qui concerne le microclimat urbain, la consommation énergétique liée aux bâtiments, en tenant compte du comportement énergétique des habitants et usagers. Vous pouvez retrouver ces simulations sur le site suivant.

 

L’enjeu de modéliser la ville

Des arbres aux bâtiments, en passant par les chaussées ou le sous-sol, tous ces éléments participent aux échanges d'eau et d'énergie entre la surface urbaine et l'atmosphère, et donc au climat local. Pour tenir compte de ces multiples échanges, les chercheurs de Météo-France ont développé un " modèle de ville " baptisé TEB (Town Energy Balance). Validé dans les années 2000, TEB prend en compte les paramètres de surface ayant une influence significative sur l'atmosphère. La géométrie urbaine y est simplifiée : le modèle ne vise pas à simuler explicitement tous les détails d'un bâtiment ou d'une rue donnée, mais plutôt les processus à l'échelle d'un quartier. Pour chaque maille du modèle, la ville est représentée par une rue-type du quartier définie par sa largeur, la hauteur de ses immeubles, les matériaux utilisés pour le bâti, la couleur et l'isolation des toits et des façades, la proportion de fenêtres, etc. La résolution du modèle peut atteindre 100 mètres.

Le modèle TEB repose sur des équations physiques de conservation et d'échanges d'énergie et d'eau. Il peut donc être utilisé pour n'importe quelle ville dans le monde. Il a déjà été testé dans une dizaine de villes du monde, situées à des latitudes variées : Paris, Marseille, Toulouse, Nantes, Lodz, Bâle, Ouagadougou, Mexico, Oklahoma City, Vancouver, Montréa, ou encore Melbourne.

Développé à l'origine pour affiner les prévisions du temps sur les villes, TEB permet aussi d'étudier les impacts du changement climatique dans les agglomérations et d'évaluer les stratégies d'adaptation envisagées pour y faire face. Il fournit des informations sur les flux d'énergie, d'eau et de CO2 entre la ville et l'atmosphère, le microclimat urbain de chaque quartier, le confort thermique, etc.

Les chercheurs s'efforcent d'améliorer la prise en compte de la végétation urbaine dans son ensemble et pas seulement celle des jardins, comme c'est le cas actuellement. Ils évaluent également les usages des habitants en matière de climatisation et d'aération des logements pour intégrer de nouveaux paramètres dans le modèle.