Évènements Image satellite le 22 janvier 2002 à 12 UTC.

Météo-France

Il y a 20 ans : le cyclone Dina frappait la Réunion

21/01/2022

Il y a exactement 20 ans, le 22 janvier 2002, l’île de La Réunion était violemment frappée par le passage du cyclone tropical intense Dina, assurément le plus marquant des trois dernières décennies sur le département. Il faut, en effet, remonter à Firinga, en janvier 1989, pour retrouver un épisode cyclonique au moins aussi virulent sur l’île.

Chronologie et trajectoire

Dina, 4e système dépressionnaire tropical de la saison 2001-2002 sur le sud-ouest de l’océan Indien, est apparu à la mi-janvier 2002 au cœur de l’océan Indien, à quelque 3 000 km au nord-est de La Réunion. La perturbation tropicale, formée le 16 janvier, à l’est des Chagos.

Après avoir parcouru 1 500 km en l’espace de 48 heures entre le 16 et le 18 janvier, le cyclone ralentit son déplacement, sur une trajectoire toujours orientée sud-ouest qui le dirige alors droit vers l’île Rodrigues… Le 20 janvier au matin, Dina est au summum de sa puissance. Classé au stade ultime de cyclone tropical intense, avec une pression centrale de l’ordre de 910 hPa, il génère des vents dont les rafales maximales sont estimées culminer à 300 km/h. 

Après son passage au nord de Rodrigues, Dina a perdu légèrement en intensité, mais, revers de la médaille, connu un élargissement du rayon d’action des vents violents présents autour de l’œil (devenu lui-même également plus large). En fin de nuit du 21 au 22, poursuivant une trajectoire ouest-sud-ouest, le centre de Dina passe à un peu moins de 65 km au nord de l’île Maurice. Ce qui signifie que les conditions les plus extrêmes, associées au mur de l’œil, passent à une vingtaine de kilomètres seulement au large. C’est aussi à ce moment-là que les premières pluies conséquentes débutent sur les hauteurs de La Réunion. Après s’être redressée quelques heures vers l’ouest, la trajectoire de Dina change ensuite d’orientation au matin du 22, cette trajectoire devenant extrêmement dangereuse pour La Réunion, puis le cap se stabilise à l’ouest-sud-ouest lors de la phase d’approche finale. L’alerte rouge est décrétée en début de matinée, alors que les conditions se dégradent sensiblement sur l’île. 

Tout comme lors du passage au plus près de Maurice, la trajectoire se redresse ensuite durant quelques heures plus ouest (très probablement sous l’influence de la présence du relief de l’île), ce qui fait passer le météore finalement un peu plus au large du nord de La Réunion qu’il ne l’aurait fait sinon : le mur de l’œil transite ainsi à un peu plus de 25 km de la route du littoral (le centre du cyclone passant, quant à lui, à environ 65 km au large – même distance que pour Maurice). Conséquence de la différence de relief entre les deux îles, les conditions extrêmes observées à La Réunion sont cependant encore plus dégradées que sur l’île sœur, le relief réunionnais, nettement plus accentué, induisant un renforcement des rafales de vent et surtout des précipitations. Au moment du passage de Dina au plus près du nord de La Réunion, le système est encore classé au stade de cyclone tropical intense, avec des rafales maximales estimées à 260 km/h et une pression centrale voisine de 930 hPa.

Dans la nuit du 22 au 23, le cyclone retrouve son cap initial au sud-ouest. Contournant ainsi l’île par le nord-ouest, il ne s’éloigne que très lentement, de sorte que le centre de Dina sera resté in fine plus de 19 heures durant, à moins de 150 km des côtes du département et durant près de 10 heures à moins de 100 km. À partir du 23, avec le décalage des hautes pressions subtropicales vers le sud-est, le cyclone bifurque vers le sud et s’éloigne progressivement de La Réunion. L’alerte rouge est levée le 23 janvier à la mi-journée. Le cyclone subit dans le même temps un renforcement du cisaillement vertical de vent, ce qui l’affaiblit. Les pluies cessent sur La Réunion dans la journée du 24. 

Dina à La Réunion

Dina a sans conteste constitué un épisode cyclonique mémorable pour La Réunion, le département subissant de manière extrêmement sensible l’influence du passage du cyclone et demeurant sous l’emprise de vents cycloniques et de très fortes précipitations pendant de nombreuses heures. L’alerte rouge a ainsi duré 28 heures (du 22 à 08 h au 23 à 12 h) : il fallait remonter à Clotilda, en 1987, pour trouver une période de confinement supérieure.

Les vents ont soufflé violemment et surtout durablement, avec des vents de force cyclonique (rafales supérieures à 150 km/h) qui ont sévi pendant 5 à 15 heures suivant les endroits. À la Plaine des Cafres (1 450 m d’altitude), les rafales ont excédé les 150 km/h durant 15 heures!
Les rafales ont atteint ou excédé fréquemment les 180 km/h sur le littoral (187 km/h à Gillot-aéroport et à Saint-Louis, 180 km/h à Pierrefonds-aéroport et au Port) et localement les 200 km/h dans les Hauts (220 km/h à la Plaine des Cafres, 209 km/h au Gîte du volcan).  Un seul point de mesure d’altitude a enregistré des rafales supérieures à 250 km/h (277 km/h au Piton Maïdo, un record absolu pour l’île), mais on peut affirmer, avec un très bon degré de confiance, que de telles rafales ont également sévi, de manière localisée, dans les Hauts les plus exposés du Nord et du Nord-Ouest, secteurs qui ont subi les plus gros dommages liés au vent.

Les précipitations ont été très abondantes, exceptionnelles dans l’ouest et le sud-ouest du département (des valeurs records y ont été enregistrées, notamment sur les zones côtières). Sans avoir atteint des pics d’intensité extrêmes, ces pluies se sont maintenues durant plus de 24 heures à un niveau d’intensité très soutenu, d’où par accumulation des lames d’eau très conséquentes. 
Il est tombé souvent entre 300 et 600 mm sur le littoral, tandis que dans les Hauts on atteint 900 à plus de 1 500 mm, le maximum étant mesuré à la Plaine des Chicots (Hauts du Nord, à 1 834 m d’altitude) avec 2 036 mm en 3 jours.
Ces pluies ont généré des crues exceptionnelles dans l’Ouest et le Sud-Ouest. Ce fut le cas par exemple à l’Étang Saint-Paul. Sur les rivières du Sud (Ravine Blanche, Rivière des Remparts, Rivière d’Abord), le pic de crue observé arrive au 2e rang des plus élevés, seulement dépassé par l’épisode Firinga

Une grande houle cyclonique a déferlé sur les côtes du département. On estime que la hauteur maximale des vagues ayant déferlé sur le littoral de la façade nord de l’île a pu atteindre les 14 à 15 mètres le 22 janvier.

Dina, dernier cyclone majeur à La Réunion

Dina reste, de fait, le dernier épisode cyclonique majeur qu’ait connu La Réunion, bien au-dessus des épisodes qui lui ont succédé depuis 20 ans. La tempête Diwa en 2006, puis le cyclone Gamede en 2007, Dumile en 2013, Bejisa en 2014, Berguitta et Fakir en 2018, ont certes généré de fortes pluies et/ou des rafales de vents cycloniques (i.e. supérieures à 150 km/h) sur une partie de l’île, mais aucun ne rivalise avec Dina sur le plan de l’intensité et de la durée des conditions cycloniques (aucune région de l’île n’étant en outre épargnée), ou sur l’ampleur des dégâts associés. Avant Dina, le dernier cyclone dont l'œil est passé directement sur l'île remontait au 19 janvier 1993, avec le cyclone Colina (qui succédait à Firinga, en 1989, et à Clotilda, en 1987).

Le scénario du pire évité malgré tout

Les conséquences et les dégâts liés à Dina ont été importants. Les réseaux routier, électrique et téléphonique  ont été mis à rude épreuve. La distribution d'eau a été très affectée. Les communications ont cessé avec l'effondrement du pylône émetteur principal de la télévision publique RFO. Le radar de Météo-France au Colorado a été emporté par le vent. L'agriculture sur l'île a été dévastée. Mais on n'est pas passé loin d'une catastrophe encore bien pire.

Il faut, en effet, être conscient que La Réunion a eu beaucoup de chance, car l’île a été épargnée par les vents les plus dévastateurs présents au voisinage du mur de l’œil du cyclone. En l’occurrence, on peut estimer que si le centre de Dina était passé ne serait-ce que 25 km plus au sud (soit une différence minime en termes de trajectoire), l’île, et plus particulièrement sa façade nord-ouest, qui aurait alors été directement frappée par les vents les plus violents associés au phénomène, aurait subi des vents nettement supérieurs, 50 km/h de plus a minima pour les rafales maximales, un tel supplément représentant en fait un écart considérable en termes d’impact du vent sur la végétation et les structures. Les conséquences auraient été bien plus catastrophiques si ce scénario du pire s’était produit. La Réunion y a fort heureusement échappé, mais cela s’est joué à rien...