Cyclones et changement climatique
15/01/2024Le changement climatique à l’œuvre a-t-il une influence sur les cyclones ? Si les cyclones ne sont pas plus nombreux, ils sont plus violents. Les simulations pour le XXIe siècle indiquent une augmentation de leur intensité. Le changement climatique modifie aussi leur zone d’activité.
Des cyclones plus intenses
Les simulations du climat pour le XXIe siècle du sixième rapport du GIEC indiquent que la violence des cyclones augmente sous l’effet du changement climatique. Leur intensité moyenne est attendue d’augmenter de 5 % et la proportion de cyclones très intenses (i.e. le rapport du nombre de cyclones de catégorie 4 et 5 au nombre total de cyclones) devrait augmenter de 14 %. Quant aux pluies cycloniques, une robuste tendance indique une augmentation de près de 12 % pour un réchauffement global de 2 °C. Enfin, l’élévation du niveau des océans fait peser un risque accru d’inondation associée aux cyclones tropicaux. Néanmoins, ce risque pourrait être modulé localement par des changements de fréquence et d’intensité.
Observe-t-on plus d’ouragans dans l’Atlantique nord ?
On observe une augmentation de l’activité des cyclones tropicaux dans l’Atlantique nord depuis les années 1970. Leur fréquence semble augmenter plus fortement dans les années 2000. En 2020, un nombre record de 30 systèmes cycloniques a été observé. La climatologie 1991-2020 sur l'Atlantique Nord est de 14 tempêtes nommées par an, dont 7 ouragans, dont 3 ouragans majeurs.
Cyclones : des observations récentes
Les climatologues disposent d’observations sur les cyclones tropicaux depuis la fin du XIXe siècle, surtout sur l’Atlantique. Ces phénomènes naissant sur les océans, ils pouvaient passer inaperçus avant l’arrivée des satellites. Depuis les années 1970, la mise en place d’un réseau complet de satellites, scrutant la Terre en permanence, a permis de constituer une base de données homogène et précise. Grâce à ces observations satellitaires, les climatologues ont pu identifier des tendances fiables de l’activité cyclonique, de 1970 à nos jours. Deux tendances marquantes : une augmentation de la proportion des cyclones très intenses et une extension vers les pôles de la zone d’activité des cyclones.
Néanmoins, il convient de rester prudent face à ces chiffres. En effet, sur l’Atlantique nord en particulier, l’activité cyclonique varie de manière naturelle selon des cycles de plusieurs dizaines d’années liés à des anomalies de température de surface de l’océan.
Avec un recul d’une cinquantaine d’années seulement, il est très difficile de distinguer l’impact du changement climatique de la variabilité naturelle du phénomène.
Comment expliquer cette tendance ?
Le changement climatique réchauffe la température des mers et des océans à la surface du globe et bouleverse la circulation générale de l’atmosphère.
Une température de surface de l’océan plus élevée ne « facilite » pas forcément la naissance de cyclones. Mais un cyclone déjà bien formé « puisera » bien plus d’énergie pour se renforcer dans une atmosphère humidifiée au-dessus d’océans réchauffés. En effet, la capacité de l’atmosphère à contenir de l’humidité augmente avec sa température. Ce supplément d’humidité sera à l’origine d’un renforcement des pluies cycloniques qui elles-mêmes intensifient le système.
Cyclones et changement climatique : les recherches menées à Météo-France
Au cours des dernières années, Météo-France a mené deux études sur l’influence du changement climatique sur les cyclones en se focalisant sur deux zones : l’Atlantique nord et le sud-Ouest de l’océan indien. Les recherches utilisent une configuration adaptée de notre modèle global ARPEGE.
Cyclones et changement climatique : des simulations délicates
Les rapports successifs du GIEC documentent toujours plus la complexité des changements qui pourraient se produire à l’avenir sur le développement et le cycle de vie des cyclones tropicaux. Il est cependant très difficile de simuler l’évolution des cyclones sous l’effet du changement climatique. Les modèles qui simulent l’évolution du climat à l’échelle du globe parviennent difficilement à bien représenter ces phénomènes. Les progrès constants de la recherche sur la résolution des modèles (échelle spatiale la plus petite représentée dans les modèles) permettra dans un futur proche d’affiner les simulations.
La première étude s’est concentrée sur l’Atlantique nord au cours des prochaines décennies. Les résultats révèlent, pour la seconde moitié du XXIe siècle, un décalage de l’activité cyclonique vers le nord, qui rendrait la mer des Caraïbes et le golfe du Mexique plus paisibles au détriment de la côte est des États-Unis. Elle a également identifié la partie est du bassin Atlantique, où les systèmes précipitants liés à la mousson quittent l’Afrique, comme une zone clef à surveiller.
La seconde étude a été consacrée au Sud-Ouest de l’océan indien dont Météo-France a la responsabilité de la prévision cyclonique. La même tendance au décalage de l’activité cyclonique vers les hautes latitudes a été mise en évidence.
À l’avenir, les saisons cycloniques tendent également à être plus ramassées dans le temps, selon ces deux études.