Météo-France / L’Œil du climat / René P.
Météo-France éclaire le climat en France jusqu’en 2100
22/09/2025Étés plus chauds, hivers plus doux, sécheresses plus longues… De nombreux effets du changement climatique sont déjà visibles en France. Mais qu’en est-il pour le climat futur ?
Une Trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique (TRACC) a été définie, correspondant aux émissions de gaz à effet de serre résultant des engagements des pays. D’autres futurs sont possibles, de plus fort ou plus faible réchauffement, en fonction des émissions de gaz à effet de serre des prochaines décennies. En s’appuyant sur trois scénarios utilisés par le Groupe d’experts international sur l’évolution du climat (GIEC) - émissions faibles, intermédiaires et fortes de gaz à effet de serre -, Météo-France produit des projections à l’échelle de notre territoire, jusqu’à la fin du siècle. Le scénario intermédiaire est le plus proche de la TRACC, qui anticipe un réchauffement de +2,7 °C en 2050 et +4 °C en 2100 par rapport à la période pré-industrielle.
Quel climat en France en 2050 ?
À l’horizon 2050, l’évolution du climat est peu dépendante des scénarios climatiques.
Poursuite de la hausse rapide des températures
En 2050, la température moyenne en France pourrait augmenter d’environ +1,8 °C à +2,4 °C par rapport à la période de référence 1976-2005. Le nombre de jours de vagues de chaleur pourrait atteindre en moyenne 20 à 25 jours par an, avec des conséquences sur la santé humaine, sur tous les secteurs d’activité, ainsi que sur les milieux naturels et la biodiversité.
Le réchauffement serait plus marqué en été (entre +2,1 °C et +2,7 °C) qu’en hiver (entre +1,4 °C et +2,2 °C), et le sud-est du pays et les Alpes se réchaufferaient plus que le nord-ouest du pays (+0,5 °C environ).
14,5 °C : une valeur inédite en 2022, mais une normale en 2050
L’année 2022, avec une température moyenne annuelle de 14,5 °C, est l’année la plus chaude jamais mesurée. En 2050, la température observée en 2022 deviendrait la norme, c'est-à-dire une valeur pouvant être dépassée en moyenne une année sur deux.
Une évolution des précipitations incertaine
Le cumul des précipitations resterait fortement variable d’une année à l’autre, en moyenne stable à l’échelle de la France, mais les précipitations utiles (différence entre précipitation et évaporation) devraient diminuer sous l’effet de la hausse des températures.
Les simulations ne montrent pas de tendance marquée à l'échelle annuelle malgré une légère augmentation sur le quart nord-est du pays (+5 % environ).
Des évolutions saisonnières apparaissent avec une légère hausse l’hiver (environ +10 %) et baisse en été (-5 % à -10 %).
Les événements de fortes précipitations seront plus fréquents et intenses qu’aujourd’hui (environ +10 %). Toutefois, à cause de l’augmentation de l’évaporation, la période de sols secs s’allongera d’un mois, avec un fort impact sur la disponibilité de l’eau, en particulier pour les cultures et la végétation.
Et quelles évolutions du climat en 2100 ?
Les trois scénarios se différencient nettement pour la 2ᵉ moitié du 21ᵉ siècle.
Écart par rapport à la période 1976-2005 de la température moyenne annuelle agrégée sur la France simulée à partir de l'ensemble Explore2 sur la période 1976-2100 selon les trois scénarios climatiques (RCP2.6, RCP4.5 et RCP8.5). Les niveaux de réchauffement de la TRACC sont indiqués par rapport à la période pré-industrielle (1900-1930).
Dans le scénario à fortes émissions (très éloigné de l’accord de Paris), le réchauffement annuel moyen pourrait dépasser +5 °C par rapport à la période de référence 1976-2005. Le climat de la France serait complètement différent de celui d’aujourd’hui.
À l’opposé, dans le scénario à faibles émissions (proche de l’accord de Paris), la température moyenne en France se stabiliserait à la valeur atteinte vers 2050.
Entre ces deux extrêmes, un scénario à émissions intermédiaires conduit à une hausse de la température moyenne en France en 2100 qui pourrait s’approcher de +3 °C par rapport à la période de référence 1976-2005. Ce scénario est proche de la référence de la TRACC qui considère un réchauffement de +4 °C par rapport à l'ère préindustrielle.
Quel climat en 2100 en France dans une trajectoire d’émissions intermédiaires à fortes ?
Des canicules quasi permanentes en été
Dans une trajectoire d’émissions intermédiaires à fortes, la France subirait 10 à 15 fois plus de nombre de jours de vagues de chaleur en fin de siècle que pendant la période 1976-2005. Les vagues de chaleur pourront durer deux mois en continu avec des intensités beaucoup plus marquées qu’aujourd’hui. Durant l’été, des valeurs de 50 °C pourraient être régulièrement atteintes ou dépassées.
Les conséquences sur la santé, comme l’hyperthermie (augmentation de la température corporelle) ou les maladies à vecteurs (transmission par des insectes et acariens), seront importantes. Tous les secteurs seront touchés par les effets de la chaleur, et en particulier les infrastructures, les réseaux, la production agricole ainsi que les milieux naturels.
Des sécheresses beaucoup plus longues
Du fait de l’augmentation de l’évaporation, toutes les régions s’assécheraient fortement, avec des conséquences sur la disponibilité de l’eau, plus critiques encore dans les régions méridionales.
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Un cycle de l’eau profondément modifié
Les précipitations hivernales augmenteraient de 15 à 20 % en moyenne. De plus, parce qu’il y aura davantage de vapeur d’eau dans l’atmosphère, les événements de fortes précipitations seraient plus intenses qu’aujourd’hui, avec des cumuls qui pourront en moyenne augmenter de 15 %, occasionnant des inondations plus fréquentes.
En été, les précipitations diminueraient de près de 20 %, conduisant à un assèchement marqué des sols. Sur l’ensemble de l’année, la plus forte évaporation, conduirait à une diminution de la ressource en eau, plus marquée dans les régions méridionales. Le risque de feux devrait se généraliser à l’ensemble du pays.
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La quasi-disparition de la neige et des glaciers
En montagne, la présence de la neige se réduirait très fortement à toutes altitudes et deviendrait très irrégulière en moyenne altitude. En dessous de 4000 mètres, les glaciers des Alpes pourraient disparaître et le pergélisol serait considérablement réduit, avec des conséquences sur la ressource en eau et la stabilité des falaises rocheuses de haute altitude.
Une forte augmentation du niveau de la mer
Une élévation de l’ordre de 60 cm à plus d’un mètre par rapport à 1900, modifierait la physionomie des littoraux en submergeant des zones exposées comme les habitations, les salines, les polders, les îles ou les estuaires.
Réduire nos émissions de gaz à effet de serre et s’adapter
La réduction de nos émissions de gaz à effet de serre joue donc un rôle majeur pour déterminer le climat futur, où chaque dixième de degré de réchauffement compte. Des politiques climatiques efficaces sont dès aujourd’hui nécessaires pour nous permettre de limiter les conséquences de nos modes de vie actuels sur ceux des générations à venir. Une bonne anticipation, avec la mise en œuvre de moyens d’adaptation, est aussi un facteur important de résilience face à cette nouvelle donne climatique.
En parallèle de la nécessaire réduction de nos émissions de GES, Météo-France propose des outils pour mieux comprendre et anticiper les évolutions climatiques potentielles au plus près des territoires afin de prendre les bonnes décisions d’adaptation.
Météo-France contribue aux travaux du GIEC et aux avancées pour comprendre le changement climatique
Des personnels de recherche de Météo-France participent à l’élaboration des rapports du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) et au développement de modèles de projections climatiques globaux. De plus, ces scientifiques produisent des simulations régionales à échelle plus fine sur les zones Afrique et Méditerranée et en outre-mer. Ils et elles coordonnent en particulier les recherches sur la mer Méditerranée, où la forte urbanisation, les questions d’accès à l’eau potable et l’intensité croissante des événements météorologiques extrêmes constituent un ensemble d’enjeux complexes. Ces chercheurs configurent spécifiquement les modèles de Météo-France pour obtenir des données de projections climatiques à échelle fine sur cette zone, et travaillent au croisement de plusieurs modèles pour obtenir des projections sur les données hydrologiques.
Une Trajectoire de réchauffement de référence pour mieux s’adapter
En lien avec le plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3) qui définit la stratégie en la matière, Météo-France a conduit des travaux d’évaluation pour aboutir à une Trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique (TRACC). Cette trajectoire se fonde sur des niveaux de réchauffement pour la France de +2 °C à l’horizon 2030, +2,7 °C à l’horizon 2050 et +4 °C à l’horizon 2100 (par rapport à 1900).
Comprendre l’élaboration de la Trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique