Questions Un microclimat urbain

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Pourquoi fait-il plus chaud en ville qu'à la campagne la nuit ?

21/06/2021

La nuit, la température en ville peut rester plus élevée que dans les zones rurales voisines ; il se crée ainsi une bulle de chaleur sur la ville, appelée îlot de chaleur urbain (ICU). Ce phénomène est encore plus marqué l'été en période de fortes chaleurs.

Un microclimat au cœur de la ville

La journée, à la campagne, la végétation utilise l'eau et l'énergie solaire pour la photosynthèse. Grâce à l'énergie solaire, elle « transpire » l'eau puisée dans le sol, qui est évaporée vers l'atmosphère. Les sols perméables vont aussi utiliser l'énergie solaire pour évaporer l'eau qu'ils contiennent. C'est le phénomène d'évapotranspiration. Grâce à elle, végétaux et sols n'accumulent pas l'énergie solaire qu'ils reçoivent mais la consomment.

En ville au contraire, l'énergie solaire est emmagasinée dans les matériaux des bâtiments et des surfaces imperméables comme le bitume, qui s'échauffent et la stockent. 

La nuit, l'apport en énergie solaire cesse. À la campagne, l'évapotranspiration s'arrête et la température diminue, alors qu'en viIle, les surfaces imperméables restituent à l'atmosphère urbaine l'énergie accumulée durant la journée. L'air au-dessus de la ville se refroidit donc moins qu'à la campagne générant ainsi l'ICU, phénomène essentiellement nocturne qui traduit l'écart de température observé entre une agglomération et les zones moins urbanisées alentour. 

La chaleur liée aux activités humaines et l'environnement (mer, lacs et relief) peuvent égaIement avoir une influence sur l'ICU, mais dans une moindre mesure. La pollution atmosphérique en ville ne crée pas l'ICU, cependant, certaines conditions météorologiques peuvent accentuer à la fois la pollution atmosphérique et l'ICU. 

L'îlot de chaleur urbain est un microclimat au cœur de la ville.

L'exemple de l'îlot de chaleur urbain à Paris

Avec son tissu urbain très dense, Paris génère un ICU qui se traduit par des différences de températures nocturnes avec les zones rurales voisines de l'ordre de 2,5 °C en moyenne annuelle. Ces différences peuvent atteindre 10 degrés en été, en cas de situation anticyclonique par vent faible et ciel clair, comme les canicules. L'ICU se caractérise généralement à l'échelle d'une agglomération, mais au sein même des villes coexistent des micro-zones de chaleur et des « îlots de fraîcheur ». Les quartiers historiques anciens, plus denses, étaient conçus pour conserver la chaleur. Au sein des quartiers plus modernes, les bâtiments sont organisés en plan très ouvert et exposé au soleil, mais la faible densité bâtie donne de meilleurs capacités nocturnes de rafraîchissement. L'eau peut être une source de fraîcheur. La température des grandes masses d'eau de la Seine et des canaux évolue très lentement (forte inertie thermique). Elle reste plus fraîche que la température de l'air ambiant, rafraîchissant ainsi les abords du fleuve. L'activité humaine, quant à elle, contribue à réchauffer l'espace public, avec, par exemple, le recours aux systèmes de climatisation dans les bureaux et les appartements. L'ensemble de ces facteurs va affecter le confort thermique ressenti dans l'espace public. Ces variations sont liées à différentes combinaisons de formes urbaines, de types de sols, à la présence ou non de végétation et d'activités humaines, avec des propriétés différentes de refroidissement et d'échauffement.

Le nouveau contexte climatique au XXIe siècle

Au cours du XXle siècle, les vagues de chaleur seront de plus en plus fréquentes, longues et intenses en France. En juin, juillet, août, les projections climatiques réalisées par les climatologues de Météo-France à Paris indiquent une hausse des températures moyennes comprise entre 1,0 et 5,3 °C. Le nombre de journées annuelles avec une température maximale supérieure à 25 °C devrait passer de 59 à 109, contre 49 jours actuellement. Le nombre de jours de canicule devrait atteindre 3 à 26 jours par an, au lieu d'1 jour en moyenne actuellement. Le territoire parisien, déjà plus sensible aux événements extrêmes que les communes rurales, devra faire face à une amplification de l'inconfort thermique en raison de son îlot de chaleur urbain particulièrement intense en période de fortes chaleurs. Cette perspective d'un nouveau contexte climatique incite à l'adaptation et à la mise en œuvre de solutions de thermorégulation pouvant influencer l'intensité des ICU.