Laurent Heurley / L’œil du climat / Météo-France
Quels sont les effets du changement climatique ?
05/11/2025Le changement climatique se manifeste d’abord par une hausse de la température de l’air et des océans sur l’ensemble de la planète. Ce réchauffement, causé par l’accumulation de gaz à effet de serre lié aux activités humaines, bouleverse déjà l’équilibre du système climatique. Il modifie les régimes de pluie, amplifie les événements extrêmes, accélère la fonte des glaces, perturbe la biodiversité et affecte les sociétés humaines. Cet article s’appuie sur des données mondiales, mais met particulièrement en lumière les impacts observés en France, et en Europe où le réchauffement moyen est presque deux fois plus fort que le réchauffement planétaire.
Pourquoi la planète se réchauffe-t-elle ? Et la France encore plus ?
La Terre s’est déjà réchauffée de près de +1,4 °C depuis l’ère préindustrielle (1850-1900). « Ce réchauffement est directement lié à l’augmentation des concentrations de gaz à effet de serre, en particulier le CO2 issu de la combustion des énergies fossiles », rappelle Jean-Michel Soubeyroux, directeur scientifique adjoint de la direction de la Climatologie et des Services climatiques à Météo-France.
Mais ce réchauffement n’est ni uniforme ni linéaire. Les régions arctiques, très sensibles à la disparition de la banquise et du manteau neigeux qui renvoient normalement une grande partie du rayonnement solaire, connaissent un réchauffement deux à trois fois supérieur à la moyenne mondiale. Les continents se réchauffent plus vite que les océans, car l’eau emmagasine et redistribue davantage de chaleur que les sols. La France, et globalement le continent européen, subit ce mécanisme amplificateur : son réchauffement est déjà de + 1,9 °C depuis l’ère préindustrielle.

À cela s’ajoutent des facteurs régionaux. Le positionnement de l’Europe occidentale à proximité de l’Afrique du Nord et du Sahara favorise des vagues de chaleur plus intenses lorsque les vents dominants changent. « Ces mécanismes expliquent pourquoi le thermomètre monte plus vite chez nous qu’au niveau planétaire », souligne Jean-Michel Soubeyroux.
Pour aller plus loin : Comment le climat de la France a-t-il évolué depuis 1900 ?
Des saisons et des océans déjà bouleversés
L’élévation de la température moyenne entraîne des effets bien visibles. Les hivers sont plus doux, avec des périodes de gel plus courtes et moins fréquentes. Les étés, à l’inverse, connaissent des vagues de chaleur plus intenses et plus longues. L’été 2025 en est une illustration marquante : il a atteint des niveaux de température inédits, et aurait provoqué plus de 16 500 décès en Europe selon une étude récente.
Le saviez-vous ?
L’été 2025, marqué par deux épisodes caniculaires et des incendies d’ampleur, est le 3e été le plus chaud enregistré en France depuis le début des mesures en 1900 et le 2e pour le nombre de jours de vague de chaleur.
Les océans absorbent une grande partie de la chaleur et du CO2 excédentaires, ce qui accentue leur acidification. La Méditerranée n’est pas épargnée : de véritables vagues de chaleur marines menacent herbiers, coraux et faune aquatique. Par ailleurs, la dilatation de l’eau sous l’effet du réchauffement, combinée à la fonte des glaces continentales, a déjà entraîné une élévation moyenne du niveau des mers d’environ 20 cm depuis la fin du 20ᵉ siècle. Une tendance qui s’accélère avec une hausse actuelle de près de 3 mm par an.
Pour aller plus loin : Gaz à effet de serre : quels impacts sur le climat ?
Idées reçues sur le changement climatique
« Il a toujours fait chaud l’été, donc le changement climatique n’existe pas vraiment. »
FAUX. Les canicules ont toujours existé, mais leur fréquence, leur intensité et leur durée ont fortement augmenté. En France, le nombre de jours de vagues de chaleur est passé de 2 jours par an en moyenne dans les années 1960 à plus de 13 jours par an sur la dernière décennie. Les 10 étés les plus chauds en France depuis 1900 ont tous eu lieu après les années 2000.
« On ne peut plus rien faire, il est déjà trop tard pour limiter les effets du changement climatique. »
FAUX. Réduire rapidement les émissions de gaz à effet de serre permet de freiner le réchauffement et de limiter ses conséquences futures. En parallèle, l’adaptation des territoires – gestion de l’eau, protection des forêts, aménagement des côtes – permet de réduire de nombreux risques.
« Les efforts entrepris aujourd’hui décideront de l’ampleur des bouleversements de demain. » Jean-Michel Soubeyroux
Canicules, sécheresses, pluies diluviennes… Pourquoi se multiplient-elles ?
Cette planète plus chaude agit comme un carburant pour les événements extrêmes. « Les canicules sont aujourd’hui beaucoup plus fréquentes, les sécheresses plus sévères et les épisodes pluvieux intenses plus marqués », résume Jean-Michel Soubeyroux. L’été 2022 a vu s’installer une sécheresse historique en France, avec des restrictions d’eau inédites et des pertes agricoles importantes. Le manque d’eau, associé à des chaleurs prolongées, fragilise les forêts et favorise les incendies, même dans des régions auparavant épargnées, comme la Bretagne.

Les effets d'un incendie de forêt dans l'Aude - @sailor66 via @Infoclimat
Les régions méditerranéennes habituées aux incendies sont aujourd’hui confrontées à des mégafeux devenus incontrôlables comme ceux rencontrés lors de l’été 2022 en Gironde, et plus récemment en 2025 dans l’Aude.
Le saviez-vous ?
Le réchauffement perturbe aussi le cycle de l’eau. Une atmosphère plus chaude peut contenir davantage d’humidité qui, en se condensant, libère une énergie considérable. Résultat : des pluies plus intenses, des orages violents, des inondations soudaines et des tempêtes plus puissantes. Ce cocktail de chaleur, de sécheresse et de précipitations extrêmes accroît les risques d’érosion des sols et déstabilise durablement les ressources en eau. Ces changements forment un enchaînement : ils amplifient la pression sur les glaciers, les océans et la biodiversité.
Quand les glaciers disparaissent et que la mer gagne du terrain
Les glaciers de montagne rétrécissent à une vitesse sans précédent. Dans les Alpes, la moitié du volume de glace a déjà disparu depuis 1900. Dans les Pyrénées, il ne reste plus que 10 % des glaciers présents il y a un siècle, et ils auront totalement disparu dans une dizaine d’années. « Les glaciers sont très sensibles aux évolutions de température, ils sont des témoins du réchauffement observé », rappelle Jean-Michel Soubeyroux. Leur recul rapide entraîne des éboulements, des crues glaciaires et une baisse de la ressource en eau pour les vallées en été, car ils alimentent rivières et nappes phréatiques pendant la saison sèche.

La fonte des glaces contribue, avec la dilatation des océans, à l’élévation du niveau de la mer déjà visible sur les côtes françaises. Elle accélère l’érosion du littoral et accroît le risque de submersion. Des tempêtes accompagnées de surcotes marines, c’est-à-dire d’élévation temporaire du niveau de la mer sous l’effet du vent et de la pression atmosphérique, peuvent inonder des zones habitées, endommager les infrastructures portuaires et favoriser l’intrusion d’eau salée dans les nappes phréatiques. Ces menaces pèsent sur des millions de personnes et sur des activités économiques aussi diverses que l’agriculture côtière ou le tourisme balnéaire. Et cette pression sur les écosystèmes côtiers s’ajoute à d’autres bouleversements environnementaux.

Mille-feuille de la côte basque de Fiona Demichelis / L’œil du climat / Météo-France
Océans, forêts, animaux : la nature tente de s’adapter
Le changement climatique agit sur les écosystèmes comme une double contrainte : il réchauffe et il acidifie. Dans les océans, ces deux effets fragilisent les coraux, les coquillages et les poissons, perturbant ainsi la chaîne alimentaire. Les épisodes de blanchissement massif des coraux se multiplient, en Méditerranée comme sous les tropiques.
Sur les continents, la végétation souffre. Les forêts françaises dépérissent à cause de la sécheresse, des canicules et des attaques d’insectes ravageurs qui prolifèrent dans les arbres affaiblis. Ces pressions diminuent leur capacité à jouer leur rôle de puits de carbone, pourtant essentiel pour ralentir le réchauffement.
La faune n’est pas épargnée. Beaucoup d’espèces migrent vers le Nord ou en altitude pour retrouver des conditions climatiques favorables. Celles qui ne peuvent pas se déplacer, ou dont le cycle de reproduction est trop spécifique, voient leur survie compromise. Les oiseaux migrateurs modifient leurs calendriers, les poissons déplacent leurs aires de reproduction et les pollinisateurs se retrouvent en décalage avec la floraison des plantes dont ils dépendent. Ces perturbations écologiques, en cascade, affectent aussi l’agriculture, l’alimentation et la santé humaine.
Santé, agriculture, économie : comment le climat change déjà nos vies
Les impacts du changement climatique ne se limitent pas aux milieux naturels : ils touchent directement les sociétés, « et plus durement les populations déjà vulnérables », souligne Jean-Michel Soubeyroux. Les vagues de chaleur frappent particulièrement les personnes âgées, isolées ou en situation précaire.
L’agriculture est en première ligne. Les sécheresses, les canicules et les événements extrêmes réduisent fortement les rendements et imposent des changements de pratiques : adaptation des cultures, développement de variétés plus résistantes, irrigation plus raisonnée. L’accès à l’eau devient un enjeu stratégique, tout comme la préservation des sols. Sur le plan sanitaire, les vagues de chaleur augmentent les risques de déshydratation et de maladies respiratoires, et favorisent la propagation de certains vecteurs comme les moustiques tigres, capables de transmettre des maladies dans des zones où ils étaient absents (épidémie de chikungunya à Antibes en septembre 2025).
L’économie dans son ensemble est affectée. Les canicules répétées pèsent sur la productivité et peuvent dissuader les déplacements en été. Les infrastructures côtières, qu’il s’agisse de ports, de routes ou d’habitations, doivent être repensées pour résister à l’érosion et aux submersions. L’ensemble de ces pressions dessine un futur où l’adaptation est indispensable pour protéger les populations et maintenir ou transformer les activités.
Lire aussi : Comment le changement climatique transforme notre quotidien
Partout, les observations convergent : le changement climatique est déjà en cours et ses effets s’intensifient. Comprendre ces impacts, c’est prendre la mesure de l’urgence à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à adapter nos sociétés pour limiter les dommages à venir. Les efforts entrepris aujourd’hui décideront de l’ampleur des bouleversements de demain.
Pour aller plus loin : Le climat futur en France : à quoi s'adapter ?
Une vitesse de réchauffement jamais vue !
En un peu plus d’un siècle, la planète s’est réchauffée de près de +1,4 °C, un rythme sans équivalent dans l’histoire du climat au cours des derniers millions d’années. Cette accélération se mesure à tous les niveaux : glaciers qui fondent en quelques décennies, élévation du niveau de la mer qui s’accélère, événements extrêmes plus fréquents.
« Ce qui frappe aujourd’hui, c’est la rapidité du réchauffement. Chaque dixième de degré compte : il conditionne l’intensité des impacts futurs sur les écosystèmes et les sociétés humaines. » Jean-Michel Soubeyroux
À retenir
- Le réchauffement de la planète est directement lié aux émissions humaines de gaz à effet de serre, principalement le CO2 issu de la combustion des énergies fossiles.
- Les vagues de chaleur, les sécheresses et les pluies intenses deviennent plus fréquentes et plus violentes, modifiant le cycle de l’eau et fragilisant les forêts.
- Les glaciers alpins et pyrénéens reculent rapidement, alimentant la montée du niveau de la mer qui favorise l’érosion et la submersion des littoraux.
- La biodiversité est fortement perturbée : coraux blanchis, forêts affaiblies, migrations d’espèces animales et décalage avec les cycles de reproduction des plantes.
- Les impacts sur notre société sont déjà là : risques sanitaires accrus, rendements agricoles menacés, infrastructures côtières fragilisées et inégalités sociales aggravées.